Le défi principal pour l’enseignant-chercheur qui se lance dans la pratique de la classe inversée à l’université est de motiver les étudiants à étudier sérieusement leur cours avant de venir le travailler autrement en « classe ». Mais ce travail de fond, toujours assez long, lui sera profitable pour la suite de son enseignement.
D’abord, un grand coup de gueule !
Comment préparer un « bon » cours, qui apporte des connaissances bien comprises, des méthodes de réflexion transposables… qu’il soit en classe inversée ou non ? S’agit-il de faire visionner aux étudiants une suite de diapositives qui ne relatent que des résultats avec très peu d’expériences qui les démontrent sans problématique clairement définie et ainsi de leur donner à voir une science dogmatique qui ne semble pas pouvoir évoluer ? Ou s’agit-il de raconter la longue enquête des chercheurs lancés à l’assaut d’une question qui les passionnait afin de former des esprits prêts à acquérir des savoirs mais aussi à réfléchir ? Serait-il possible de ne plus jamais voir la première option dans les amphithéâtres ?
Enseigner à raisonner comme en recherche, est-ce si compliqué ? Apparemment oui.
Il est assez difficile de comprendre pourquoi des enseignant-chercheurs qui ont suivi un long temps d’apprentissage à la recherche avant d’être recrutés, lors de leur thèse puis de leurs post-doctorats, et qui ont même quelquefois de longues années de recherche derrière eux, oublient qu’ils sont chercheurs une fois devant des étudiants. La pratique de la recherche est pourtant une formidable formation à l’enseignement. Une des explications possibles est qu’ils ont dans leur tête un schéma faux de la façon dont se construit un savoir. On peut ajouter leur tentation de prendre des images toutes faites sur internet pour préparer vite leurs enseignements et garder du temps pour leur recherche. Il serait utile de proposer aux maîtres de conférences, dès leur recrutement, de réfléchir sur que sont les objectifs d’un cours (faire accumuler des savoirs ou faire aussi réfléchir, analyser, imaginer, inventer) et de valoriser leur travail d’enseignement dans les évaluations. Cela rendrait les enseignants et les étudiants beaucoup plus heureux.
Fabriquer une vidéo de cours qui donne envie d’apprendre
Avec un peu d’ingéniosité et un simple smartphone ou avec l’aide d’un service universitaire dédié capable de produire des animations, les enseignants-chercheurs peuvent fabriquer des vidéos de cours attrayantes, parfois remarquables [1]. Une alternative est d’insérer dans les diaporamas des vidéos de MOOC, des vidéos disponibles sur youtube (TEDed, Khan academy), des extraits d’enregistrements audios de conférences ou d’interviews de chercheurs, ou toute autre source d’information jugée pertinente par l’enseignant.
Aider les étudiants à se situer dans leur apprentissage
Pour que les étudiants puissent se rendre compte s’ils comprennent bien le cours au fur et à mesure qu’ils l’étudient, il est important de leur poser des questions en interrompant la vidéo de temps en temps. C’est ce que l’on appelle les activités avant la classe (pre-class activities). Ce feedback est d’autant plus stimulant qu’on varie la forme des questions : des figures ou des diagrammes à légender, des questions à choix multiples (QCM), des données à apparier, des étiquettes à glisser-déposer (drag and drop)… . Bien sûr les corrections sont automatiques, vive l’informatique.
Et à bientôt pour retrouver les étudiants, mais « en classe » !
Constance Hammond
Références :
[1] https://wabisabilearning.com/blogs/technology-integration/3-flipped-learning-examples